Conference of European Rabbis Annual Review 2017-2018 (5777-5778) 52 www.rabbiscer.org Germany le journal du dimanche dimanche 17 février 2019 17 Actualité International Qu’en est-il, en Pologne, de cette fameuse loi sur la Shoah prévoyant d’emprisonner tous ceux qui prétendent que l’État polonais a été complice des nazis dans leur politique d’extermination des Juifs? La plus haute cour du pays ne s’est toujours pas prononcée, mais la loi est examinée par une commission d’experts de Pologne et d’Israël. C’est ici, à Munich, en 2018, que l’actuel Premier ministre polo- nais avait justifié cette loi, allant même jusqu’à suggérer que les Juifs s’étaient rendus complices de leurs bourreaux ! Le révision- nisme est un vrai sujet qui affecte la plupart des pays de l’ex-bloc de l’Est. En Hongrie, il y a une ten- tative de réécrire l’Histoire. Mes grands-parents ont vécu là-bas et sont morts à Auschwitz. Le trai- tement réservé à George Soros, avec lequel on a le droit de ne pas être d’accord, est inacceptable. Il est victime d’un antisémitisme rampant. Que pensez-vous des accusations d’antisémitisme qui pèsent sur certains leaders du Parti travailliste britannique dont Jeremy Corbyn? La gauche britannique, sous couvert de critiquer la politique de l’État d’Israël, tombe dans le piège de l’antisémitisme classique. Nous sommes ici à Munich et je ne peux pas occulter le fait que Jeremy Corbyn s’est rendu il y a cinq ans en Tunisie à une cérémo- nie d’hommage aux terroristes qui ont tué les athlètes israéliens des JOdeMunichen1972.Lemalaisea atteint un tel niveau que la grande majorité de la communauté juive britannique qui votait pour ce parti s’en détourne aujourd’hui massivement. Cet automne, vous avez publié un appel demandant aux responsables politiques israéliens de prendre leurs distances avec les leaders populistes européens dont les gouvernements sont indulgents avec l’antisémitisme. Pourtant, demain, c’est le Premier ministre Netanyahou en personne qui les reçoit à Jérusalem [lire ci- dessous]. J’ai écrit cela pour que l’on sé- pare les deux sujets : le Premier ministre doit s’occuper des Israé- liens, qui sont déjà confrontés à la menace des roquettes tirées depuis Gaza. En Europe, nous, les rabbins, sommes les gardiens de nos communautés. À nous de sécuriser leur sort et de traiter cette question de l’antisémitisme en Europe. Je note d’ailleurs que certains responsables du Likoud sont en désaccord avec Benyamin Netanyahou sur sa réception en Israël du groupe de Visegrád. Vous posez la question du départ des Juifs d’Europe pour ceux qui se sentent menacés. Quelle est la réalité des chiffres? En une décennie, le nombre des Juifs en Europe est passé de 2 mil- lions à 1,6 million. Ceux qui sont partis craignaient davantage le terrorisme islamiste que l’extrême droite. Mais s’ils partent, c’est parce qu’ils pensent à demain et à après-demain, à l’avenir de leurs enfants. Doivent-ils continuer à les faire venir dans des centres culturels comme celui où nous nous trouvons, derrière des portes blindées et sous surveillance en permanence ? Ils se posent éga- lement certainement, je le crois, la question du respect qu’ils esti- ment ne plus avoir ici. g ProPoSrECuEilliSPar FraNçoiSClEmENCEau ISRAËL En accueillant demain à Jérusalem les dirigeants polonais, slovaque, tchèque et hongrois, le Premier ministre de l’État hébreu veut déstabiliser l’Union européenne Correspondant Tel-aviv (israël) Alors qu’il doit accueillir de- main les dirigeants du groupe de Visegrád (Pologne, Slovaquie, République tchèque et Hongrie), Benyamin Netanyahou a bien failli saborder ce sommet très attendu. Jeudi, en visite à Varsovie, le Pre- mier ministre israélien a souligné la collaboration des Polonais avec lesnazis« pourtuerdesJuifs »pen- dant la Seconde Guerre mondiale. Piquéauvif,legouvernementde Mateusz Morawiecki a menacé de boycotter la rencontre, avant de se satisfaire des clarifications israé- liennes. L’an passé, une polémique similaire avait éclaté autour d’une loi mémorielle condamnant à la prison tout individu associant la nation polonaise à la Shoah. En Israël, la complaisance de Netanyahou à l’égard de ces positions ne fait pas l’unanimité, tout comme la nouvelle visite de son homologue hongrois, Viktor Orbán, accusé de xénophobie. L’été dernier, à Budapest, « Bibi » avait préféré saluer son hôte pour sa politique de « tolérance zéro à l’égard de l’antisémitisme » plutôt que lui rappeler son admiration pour Miklós Horthy, artisan de la déportation de 430 000 Juifs hon- groisverslecampd’Auschwitz.Les critiques ne l’ont pas non plus dis- suadéderecevoirengrandepompe le chancelier autrichien Sebastian Kurz, allié au parti d’extrême droite FPÖ, et, plus récemment, le ministre italien Matteo Salvini, chef de la Ligue. Sonoffensivedecharmeàl’égard deleaderspopulistesestloind’être anodine. Derrière des positions hostilesàl’islametàl’immigration, ces derniers confortent le prisme nationaliste de Netanyahou, tout comme son intransigeance à l’encontre des Palestiniens. En réunissant le groupe de Visegrád, le Premier ministre provoque aussi l’Union européenne, cette « cause perdue » dont il ne cache plus vouloir briser le consensus sur les questions liées à la coloni- sation des territoires palestiniens. En novembre, il déclarait à pro- pos du groupe de Visegrád : « Il ne s’agit pas seulement d’une causerie entre amis mais d’un bloc de pays qui m’aident à promouvoir ma poli- tique, à changer l’attitude hostile et hypocrite de l’UE. » g maximE PErEz « Faut-il rester ou partir ? » Cette question sera aujourd’hui l’un des trois thèmes du débat qui sera organisé aujourd’hui à Munich, enmargedelaconférenceannuelle sur la sécurité, le « Davos » des questions stratégiques. Le rabbin Goldschmidt a présidé la com- munauté juive de Moscou avant de succéder, en 2011, au rabbin Sitruk à la tête de la Conférence des rabbins européens, établie à Bruxelles. Le thème du départ des Juifs d’Europe n’a pas été ajoutée au dernier moment, comme si elle prolongeait une crise qui vient de plus loin. Commentavez-vousréagicette semaineaudébatsurl’augmentation desagressionsantisémites? Ce sont des chiffres qui traduisent ce que l’on vit au quotidien depuis des années et qui prouvent que le phénomène s’aggrave et nous conduit vers le pire. En France, nous étions focalisés depuis dix ans sur les attentats terroristes d’origine islamiste qui visaient notre communauté. Aujourd’hui, nous voyons ressurgir des com- portements antisémites, qui coïncident avec le mouvement social des Gilets jaunes soutenu par l’extrême droite et l’extrême gauche françaises. En Allemagne, où les attaques ont progressé de plus de 50 %, leurs auteurs sont en majorité des individus d’extrême droite. En Hongrie, nous avons assisté le week-end dernier à un rassemblement de néonazis venus de toute l’Europe. Quelssontlesressorts deceretourdel’antisémitisme d’extrêmedroite? ElieWieseldisaitqu’Auschwitzn’a pas été construit avec des briques, maisavecdesmots.Quelesattaques soient perpétrées par des indivi- dus,desterroristesoudesagentsdu pouvoir, ce sont toujours des cam- pagnesverbalesquidéclenchentou facilitent le passage à l’acte. Il y a encorequelquesannées,unconsen- sus existait sur le fait que l’antisé- mitisme n’était pas politiquement correct. Ce n’est plus vraiment le cas. En Allemagne par exemple, il n’estpasétonnantquedetelsactes augmententlorsquelesloisrendent moinsrépréhensiblelanégationde l’Holocausteouleportenpublicde symboles nazis. L’extrême droite allemandeauBundestagveuttour- nerlapagesursoixante-dixansde repentance concernant la respon- sabilité allemande dans la Shoah, et certains estiment même que la présenced’unmémorialdel’Holo- causteàproximitéduParlementest une « honte ». Vousparlezégalement d’unantisémitismepolitique dontserendraientcoupables certainsgouvernements… En Islande, par exemple, le Parle- ment a essayé de voter une loi cri- minalisant de six ans de prison la circoncision.Encomparaison,cela pouvaitvaloircinqansdegoulagdu temps de l’Union soviétique. Avec d’autresleadersreligieuxchrétiens et musulmans, nous nous sommes rendussurplacepourplaidernotre cause et la loi a été annulée. En Belgique, les nationalistes islamo- phobes de Flandre et de Wallonie ont voulu criminaliser la prépara- tion des plats halal et kasher. Ces loisvisentlemondemusulmanmais lescommunautésjuivesensontles victimes collatérales. Pinchas Goldschmidt « L’antisémitisme s’aggrave dans toute l’Europe » « Elie Wiesel disait qu’Auschwitz n’a pas été construit avec des briques, mais avec des mots » « En dix ans, le nombre de Juifs en Europe est passé de 2 millions à 1,6 million » le rabbin Pinchas Goldschmidt au centre culturel juif de munich, vendredi. ANDREAS ZITT/SIPA PouR lE JDD ReLIgIonLeprésidentde laConférencedesrabbins européensanalysela recrudescencedesactes antisémitesenFrance etdanslerestedel’UE Netanyahou mise sur les populistes InteRvIew ROLOFS COMMUNICATIONS Publication: Die Welt Date: 29 May 2018 Title: „Größere Gefahr durch muslimische Antisemiten als durch Rechtsradikale“ ROLOFS COMMUNICATIONS 3 ROLOFS COMMUNICATIONS Publication: DW Deutsche Welle (online) Date: 30 November 2018 Reach: 120,000,000 unique users per month Publication: DW Deutsche Welle (online) Date: 30 November 2018 Title: Anti-Semitism: Climate has got worse for Jews in Europe, says Moscow rabbi https://www.dw.com/en/anti-semitism-climate-has-got-worse-for-jews-in-europe-says-moscow-rabbi/a-46531931 4 ROLOFS COMMUNICATIONS 3 ROLOFS COMMUNICATIONS Publication: DW Deutsche Welle (online) Date: 30 November 2018 Reach: 120,000,000 unique users per month Publication: DW Deutsche Welle (online) Date: 30 November 2018 Title: Anti-Semitism: Climate has got worse for Jews in Europe, says Moscow rabbi https://www.dw.com/en/anti-semitism-climate-has-got-worse-for-jews-in-europe-says-moscow-rabbi/a-46531931 5 ROLOFS COMMUNICATIONS